La philo en Europe...

Publié le par Bernard Sady

Le 18 juin dernier, le jour de l'épreuve de philo du bac, Favilla publiait une chronique dans Les Echos intitulée "la leçon de philo en Europe".


Cette chronique, inspirée d'un article du numéro de juin de "Philosophie Magazine" (hélas, pas en ligne...) est intéressante à plus d'un titre.



D'abord, Favilla nous apprend que la philo est enseignée de manière très différente sur notre continent.


Celui-ci est « coupé en deux : d'un côté, les nations de culture gréco-latine, où l'enseignement de la philosophie est obligatoire pendant au moins un an (France, Grèce, Roumanie), voire deux (Espagne, Portugal) ou trois (Italie, Bulgarie). De l'autre côté, les nations de culture anglo-saxonne, où cet enseignement est soit optionnel (Allemagne, Pays-Bas, Suède, Hongrie, pays Baltes), soit inexistant (Grande-Bretagne, Irlande, Pologne, Belgique).


« L'Europe connaît ainsi deux extrêmes : l'Italie, où cet enseignement est obligatoire pendant trois ans, et la Grande-Bretagne, où il est absent. De même constate-t-on que les deux berceaux principaux de la philosophie occidentale n'ont pas la même pratique : discipline obligatoire en Grèce, optionnelle en Allemagne. »


D'où vient cette différence ? « Cette diversité est le fruit d'histoires variées ». Mais il ne nous en dit pas plus.


Il continue : « et l'on n'imagine pas qu'un pouvoir bruxellois quelconque vienne imposer des directives en la matière. » En France, on a déjà l'Education Nationale pour fixer les programmes, il ne manquerait plus que Bruxelles s'en mêle...



La fin de l'article aborde un point beaucoup plus fondamental : les valeurs de l'Europe. « Il reste que cette diversité interroge notre patrimoine culturel commun. Contre ceux qui ne voient dans l'Europe qu'un marché commun économique, les partisans d'une identité européenne vantent son héritage philosophique, c'est-à-dire un ensemble de valeurs définies par Socrate puis développées par vingt-cinq siècles de réflexion. 


« Si l'on renonce à rendre ces valeurs accessibles à tous en les réservant à une élite universitaire, elles s'affaiblissent face à leurs deux concurrents : le puissant océan des intérêts économiques d'une part, la culture scientifique d'autre part. »


Mais « certains soutiennent qu'aujourd'hui toute une partie de la jeunesse n'est plus capable de suivre un enseignement de philosophie au lycée et concluent à son abandon. » La génération Y serait-elle incapable d'un minimum de réflexion ?


Notre auteur se lève contre cette tendance : « un tel renoncement serait baisser pavillon face à l'air du temps. Ce serait surtout un mauvais service à rendre à ces jeunes, notamment ceux issus de milieux modestes, en les privant des outils intellectuels de compréhension de leur monde. La philosophie n'est ni conservatrice ni progressiste. Elle est un outil de maîtrise de soi et de sa relation à l'autre, donc un outil de liberté. »


Il conclut : « C'est pourquoi sa place dans le cycle des études secondaires est un bon indicateur de développement d'une société. »


Ce qui voudrait dire que la Grande-Bretagne serait moins développée que l'Italie... Par certains côtés, l'Italie est certainement moins "barbare" sur le plan social et économique que ne l'est la Grande-Bretagne.


Cette affirmation de Favilla va complètement à l'encontre de la thèse de Peyrefitte dans "Le Mal Français", selon lequel ce sont les sociétés anglo-saxonnes qui sont en avance sur les sociétés latines... Mais il est vrai que cette thèse n'était vue que sur le plan de l'efficacité économique. Comme si c'était l'argent-roi qui faisait le bonheur des peuples... Il est quand même mieux de vivre au soleil de nos nations du sud que dans le "fog" londonien... Et il n'y a pas que le climat !


La crise économique actuelle venant des nations anglo-saxonnes en est une bonne démonstration. Ce qui est regrettable, c'est que les pays latins se soient mis à la remorque des anglo-saxons et subissent, "grâce à" la mondialisation, les contrecoups de cette crise de manière très sévère.


Et finalement, Favilla préconise : « A intégrer dans le nouveau PIB conçu par Amartya Sen ! »


Pourquoi pas ?


Mais le plus important me semble être que la philosophie permette d'acquérir ou de développer un esprit critique sur notre monde et sur toutes les informations qui y circulent, à défaut d'arriver à la « compréhension de ce monde ». Car 3 heures de philo (pour les "S") par semaine pendant une année scolaire en se contentant de survoler quelques thèmes philosophiques (liberté, vérité, conscience, langage, etc.), ne permettent pas d'aller beaucoup plus loin... Ce qui est déjà pas mal dans notre monde "google-isé", "wikipédié" et maintenant "twitterisé".


Et n'oublions pas que la philosophie utilise au moins autant le cerveau gauche (analyse) que le droit (synthèse) et est donc un bon moyen de rectifier l'hypertrophie du cerveau droit développé par les nouvelles méthodes pédagogiques en vigueur actuellement, ainsi que par la toute puissance des mathématiques (car contrairement à ce qu'on pourrait croire, les maths sont très "cerveau droit"...).




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