Goldratt et le but de l’entreprise

Publié le par Bernard Sady

J’avais présenté la position de Goldratt sur le But de l’entreprise en juillet 2009. A l’occasion d’un débat engagé sur le hub « Théorie des contraintes » de Viadeo, j’ai été amené à préciser cette position.

 

A ma connaissance, Goldratt explique ce qu’est le but d’une entreprise dans deux livres principaux : « Le But », bien sûr, et « Réussir n’est pas une question de chance ».

 

Dans « Le But », il explique très clairement que « le but de toute entreprise industrielle est de faire du profit »

 

Alors que dans « Réussir n’est pas une question de chance », il met des conditions nécessaires à ce but.

Alex, le héros, explique que dans l'entreprise, il y a trois acteurs qui ont chacun leur propre vision du but de l'entreprise : pour les actionnaires, ce sera « Gagner de l’argent maintenant et à l’avenir », pour les salariés,  « Procurer un cadre de travail satisfaisant et sécurisant pour nos salariés, maintenant et à l’avenir » et pour les clients, le but de l’entreprise sera « Satisfaire le marché, maintenant et à l’avenir ».

 

Ce qui fait bien trois buts à l'entreprise, chacun de ces buts étant poursuivi par un des acteurs...

 

« Réussir n’est pas une question de chance » date de 1994. Si Goldratt l’avait écrit l’année dernière ou cette année, il aurait peut être ajouté l’environnement ou la RSE…, ce qui aurait pu faire un quatrième, voire un cinquième but…

 

Ce qui est intéressant, c’est d’étudier le cheminement de la pensée de Goldratt pour arriver à ce résultat stupéfiant.

Il semble que Goldratt ait tenté d’adoucir le but donné à l’entreprise par la pensée économique libérale qui est de faire uniquement du profit (et donc le maximum de profit). On voit déjà cette préoccupation dans « Le But » à la page 45: Alex explique qu’il est « heureux que nous fassions travailler des gens car rien ne remplace un salaire qui tombe à la fin de chaque mois. »

 

Mais ce soucis transparaît plus nettement aux pages 81-85 de “Réussir n’est pas une question de chance” :

« Trumann n’a pas besoin de me rappeler que le but de mon entreprise est de gagner de l’argent. C’est mon leitmotiv depuis mon arrivée au poste de directeur d’usine. En même temps, j’ai toujours fait ce qu’il fallait pour que cela ne se fasse pas aux dépens de mes employés. […]

« - Je n’ai pas de mauvaises décisions à justifier, dis-je, surveillant mes paroles. Je n’ai rien à voir avec la décision initiale de diversification et cependant, je pense que cette vente n’est pas justifiée.

« - Pourquoi ?

« - Parce que nous ne traitons pas que de l’argent. Il s’agit de personnes. Les dirigeants ont, je pense, une responsabilité non seulement vis-à-vis de leurs actionnaires, mais aussi de leurs employés. »

 

Il en fait un nuage (page 83) qui oppose les intérêts des actionnaires (vendre la branche de diversification) aux intérêts des salariés (ne pas vendre la branche de diversification). On ne peut qu’être d’accord avec ce nuage. Et même, il faudrait ajouter une troisième branche avec le client qui a ses propres exigences qui ne sont pas toujours compatibles avec ce que souhaitent les salariés et les actionnaires…

Comment résout-il ce conflit ou plutôt comment le fait-il disparaître ? Même s’il commence à faire entrevoir sa solution dans ses pages 83-85, il faut faire un bon aux pages 274-280 pour l’avoir clairement.

Comme très souvent avec Goldratt, cette solution est très simple : il met comme condition nécessaire au but de chacun des protagonistes les buts des autres parties. Ainsi chaque but serait à la fois un but et une condition nécessaire d’une de ses propres conditions nécessaires… Plus fort que la systémique, Goldratt aurait inventé la “conditionnalité circulaire” !

 

Plus sérieux : Alex-Goldratt met d’abord les trois propositions sur lesquelles ils sont tombés d’accord sur le même niveau : « Nous, les dirigeants, devons faire en sorte que nos entreprises respectent ces trois propositions. » […]

 « - Vous pensez donc que ces trois propositions sont également importantes ? dit Jim en plein dans le sujet. Alors pourquoi tout le monde dit que le but de l’entreprise est de gagner de l’argent ? »

« Ne tombez par dans le piège qui voudrait que la première proposition soit plus importante. »

 (dans le texte anglais : "Don't fall in the trap that the first entity is more important").

 

Et voici la phrase clé : « quelle que soit la proposition de départ que vous prenez comme but, les deux autres deviennent des conditions nécessaires pour atteindre ce but. »

 

D’un point de vue strictement logique, on pourrait concevoir que ce soit vrai si on avait trois buts et trois chaînes causales indépendantes dans la même entreprise. Mais comme l’avait très bien montré Joël-Henry Grossard lors du débat initié par Florent Fouque sur Goldratt et la systémique, il ne peut y avoir qu’un seul but dans l’entreprise : si chacun tire dans son coin, on ne peut arriver à aucun but.

 

Un même but - ânes

 

Alors ? Revenons au nuage. Et jouons à Socrate : n’y aurait-il pas un but “principal” unique pour une entreprise dans lequel pourraient se retrouver toutes les parties prenantes, chacune ayant son propre but “secondaire”, ces derniers étant subordonnés au but principal ?

Pour reprendre l’image des ânes qui tirent chacun dans leur coin pour manger leur foin : et si au lieu d’avoir trois tas de foin, on ne faisait qu’un seul tas commun au centre ?

 

 

Mais il y a un autre point sur lequel on peut s’interroger : le fait de se préoccuper du bien-être de son personnel est-il réellement une condition du profit dans les entreprises comme l’affirme Goldratt ?

 

Cette thèse est très à la mode actuellement, mais c’est une foutaise que je démonterai lors d’un prochain billet.

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