Le "burn-out", nouveau mal du siècle...
Le "burn-out" - littéralement « consumé jusqu'à ce que plus rien ne reste » - est le nouveau "mal du siècle" (un de plus...). Il s'agit de l'épuisement professionnel de « celui qui a brûlé toute son énergie au service de son emploi, au point de ne plus avoir aucune réserve ». C'est la définition donnée par Mathilde Regnault dans un très bon dossier publié récemment par le Journal du Net : « Ce qu'il faut savoir pour évite le burn-out ».
Après avoir donné la définition du Burn-out, M. Regnault explique : « le burn-out est en réalité le fait d'un processus très mécanique et non psychique comme on l'imagine souvent. Le stress induit par une surcharge de travail provoque diverses réactions chimiques. En temps normal, ces réactions visent à produire des signaux d'alerte, qui peuvent déclencher la production d'énergie afin de fuir en courant, par exemple. [...]
« L'ennui, c'est que le stress produit au travail est rarement évacué par une activité physique. [...] Les signaux d'alerte s'accumulent donc dans l'organisme et finissent par dérégler l'ensemble de la machinerie, aussi bien physiquement que moralement. Généralement, le syndrome monte en puissance, lentement, souvent sans même que la victime s'en rende compte. [...]
« Il est alors souvent trop tard pour revenir en arrière : la personne est "en burn-out", complètement consumée, usée, démotivée. Des semaines de repos et/ou de thérapie seront probablement nécessaires pour qu'elle retrouve le goût de travailler. Loin de constituer une excuse de paresseux pour s'octroyer un congé maladie, le burn-out se manifeste au contraire chez ceux qui ont refusé de s'écouter et ont continué à s'épuiser au-delà de leurs limites. »
Le burn-out se retrouve dans toutes les catégories socioprofessionnelles. Mais surtout dans les activités sédentaires avec beaucoup de tensions. Ainsi les métiers de l'informatique dans lesquels « l'écran capte toute l'attention, on oublie tout le reste, on oublie de faire des pauses et même de manger et de boire ». Et également chez les cadres où la « position est elle aussi compliquée : ils ont souvent un rôle de tampon difficile à assumer. »
Certains points communs se retrouvent chez les personnes atteintes de burn-out :
- - La surcharge de travail et l'attitude "exigeante" de l'entreprise peuvent être des facteurs aggravants ou déclenchants.
- - Un excès de perfectionnisme se retrouve également souvent dans les cas de burn-out. «Les victimes de burn-out ne sont jamais des tire-au-flanc mais au contraire des travailleurs un peu trop acharnés. "On a généralement affaire à des gens très perfectionnistes, note Catherine Vasey. Ces personnes ne supportent pas de ne pas faire les choses à 100%." Il ne leur suffit pas de faire bien les choses, il faut les faire à la perfection. [...]Elles se fixent des objectifs tellement idéalistes qu'ils en deviennent inatteignables. Et s'épuisent à vouloir les rattraper.
- - Ces personnes mettent également l'accent pratiquement exclusif sur leur travail professionnel. Leur famille, qui pourrait être un bon remède, est reléguée au second plan.
- - Une autre caractéristique : ces personnes «ont souvent tendance à trop tenir compte des besoins des autres. Et donc à tenter de les aider, quitte à ajouter à leur propre emploi du temps une surcharge de travail.»
Il est important de savoir reconnaître les symptômes du burn-out :
- - D'abord, ces «symptômes apparaissent progressivement, au fil des semaines, ce qui les rend d'autant plus difficiles à détecter, a fortiori pour la personne concernée.»
- - Un premier symptôme c'est que la personne devient irritable, avec son entourage professionnel mais aussi avec ses proches.
- - Ensuite, «des problèmes de sommeil peuvent se manifester.»
- - Autre symptôme: «la victime de burn-out peut manifester un désir de changer de travail»
- - «L'isolement constitue un autre symptôme»
- - On peut aussi trouver les symptômes classiques du stress: «maux de ventre, problèmes de digestion, maux de tête, raideur de la nuque, yeux sensibles, difficulté à supporter le bruit...»
Et comme souvent, « la victime refuse d'écouter ces signaux d'alerte. »
C'est alors « l'explosion » : « angoisse intense, effondrement émotionnel, sentiment d'être agressé, blocage du dos, problème cardiaque... » Et « au stade ultime, ces symptômes peuvent se transformer en véritable crise, qui peut conduire à se comporter de manière inappropriée au bureau ou, pire, à la tentative de suicide. »
Mais, heureusement, il y a des moyens pour éviter d'en arriver à ces extrémités :
- - D'abord s'informer de ce qu'est le burn-out. La lecture de ce billet est un bon début...
- - Ensuite, «essayez de déterminer si vous travaillez dans un environnement propice au burn-out». L'observation de vos collègues vous renseignera sur le risque.
- - «Prêtez attention aux remarques de vos proches», car les proches remarquent très tôt un changement d'attitude.
- - Faites régulièrement un «check-up» de votre situation pour détecter très tôt les «premiers signes» du burn-out.
- - Mettez «en place des stratégies pour ne pas vous laisser déborder par le travail: savoir dire non lorsqu'on vous en demande trop, accepter de faire son travail correctement mais pas toujours à la perfection, maintenir des activités hors du travail, activité sportive notamment...»
Et si vous êtes victimes du burn-out, sachez qu'il est possible d'en sortir (heureusement...), mais que ce sera long... :
- - Vous pourrez être en arrêt de travail (prescrit par votre médecin), mais il ne devra pas être trop long pour ne pas perdre la confiance en soi.
- - Il vous faudra «avoir une activité physique d'au moins trente minutes par jour» pour évacuer le «stress accumulé».
- - Puis, vous devrez «analyser ce qui a conduit au burn-out et à mettre en place des stratégies pour que cela ne se reproduise plus.»
- - Enfin, vous vérifierez que vous êtes guéri «en retournant au travail», car c'est alors «que l'on pourra mettre à l'épreuve ces nouvelles résolutions».
Dans la lutte contre le burn-out, même si « la personnalité et l'implication de la personne dans son travail comptent pour beaucoup », les entreprises ont un rôle important à jouer :
- - «La course à la productivité dans laquelle se sont lancées beaucoup d'entreprises est propice au développement des phénomènes d'épuisement professionnel».
- - Même s'il semble qu'il y ait «depuis quelques temps» «un virage» dans l'attitude des entreprises, ce mouvement est «très lent».
- - Il s'agit d'abord de «repérer les facteurs de stress et d'épuisement communs au plus grand nombre»
- - Et ensuite de «proposer à l'entreprise des façons de réduire ces facteurs: horaires plus ramassés, possibilités de se détendre sur le lieu de travail, meilleure reconnaissance des efforts fournis...»
Avant de donner deux exemples de burn-out particulièrement impressionnants (que je me suis permis de vous donner intégralement), Mathilde Regnault conclut son dossier par quelques « idées reçues sur le burn-out ». C'est un bon résumé du dossier :
- - «Le burn-out est une fatigue normale, que certains exagèrent pour obtenir un arrêt de travail. Non, il s'agit d'un véritable épuisement, physique et moral, qui ne peut pas se soigner avec quelques simples nuits de repos.
- - «Le burn-out est une maladie de fainéants. Non, au contraire. Le burn-out survient chez des personnes qui s'investissent trop dans leur travail, passent de très longues heures au bureau et ont à cœur leur réussite professionnelle.
- - «Le burn-out s'attaque aux personnes faibles. Non, on constate au contraire que ce sont généralement les piliers de l'entreprise qui sont touchés, ceux qui ne sont jamais malades, qui sont capable d'abattre des quantités de travail impressionnantes sans se plaindre.
- - «Pour sortir du burn-out, il suffit de changer d'entreprise. Non. Le milieu dans lequel on évolue est un facteur parmi d'autres. Mais la victime de burn-out doit avant tout changer son rapport au travail.
- - «Le burn-out, c'est un phénomène de mode. Non. Ce qui l'est, c'est le fait que les médias en parlent.»
Et voici le premier témoignage, celui de Julie :
« Je connaissais des gens autour de moi l'ayant vécu et je ne comprenais pas comment ils pouvaient en arriver là. À la limite de la moquerie, je ne les comprenais vraiment pas. Et puis vint mon tour, il m'a fallu un sacré temps et des menaces de "vacances forcées" de mon chef pour remarquer que j'y étais. Pas de vraies vacances pendant plus de 2 ans, 12 h de boulot par jour, plus le reste à faire à la maison, plus le sport. Je me suis mise à faire des crises de pleurs, j'étais très susceptible, je pesais 53 kg pour 1,72 m. Mes yeux voyaient les mots mais je n'arrivais pas à lire, je voyais les chiffres mais je ne savais plus compter, j'entendais des mots mais je n'écoutais pas, impossible de me concentrer, d'avancer dans mon travail, asociale, mes amis n'existaient plus, plus de vie privée. Je dormais mais ça ne me reposait pas.
« Heureusement Noël est arrivé. Ma boîte était fermée 2 semaines. Évidemment, dès le premier jour, je suis tombée malade, le corps s'est exprimé. Après 2 semaines au lit forcé, j'ai repris le travail de façon modérée. J'ai une assistante qui m'enlève une bonne partie des tâches au boulot, tout le monde n'a pas cette chance, maintenant je bosse 40 heures par semaine et je prévois de vraies vacances. »
Puis celui de Virginie :
« C'était en 2007 et 2008... Je travaillais jusqu'à 50 heures par semaine. Avec un enfant en bas âge et les tâches ménagères, je ne me couchais pas avant minuit - 1h du matin pour me lever tous les jours à 6 h en semaine et quand je pouvais dormir jusqu'à 7h le week-end c'était une grasse matinée ! J'ai commencé à me sentir très fatiguée, carencée aussi, car étant très stressée, j'avais tendance à compenser en mangeant des grosses quantités de sucre et de chocolat, ce qui a fini par constituer mon alimentation de base. Je devenais insupportable et je commençais à mettre une grosse pression à mon entourage. Et j'ai senti la dépression arriver.
« J'ai pris plusieurs décisions... J'ai demandé à changer de poste et j'ai fait une demande de mutation. J'ai lâché prise sur le ménage pour consacrer plus temps à mon enfant. Nous avons engagé une femme de ménage. Mais ce qui m'a le plus aidée, c'est d'écouter mon corps et de prendre certaines mesures comme faire une cure de compléments alimentaires et je me suis mise à faire la sieste tous les week-ends pendant celle de mon enfant. J'ai aussi fait un travail sur moi pour contrer le sentiment de culpabilité que j'éprouvais de ne pas tout assumer toute seule. »
Le burn-out peut aussi (et surtout... on a tendance à les oublier...) concerner les chefs d'entreprise. Je terminerai donc sur la conclusion de l'article des Echos d'aujourd'hui "Etre patron pendant la crise" : « à l'heure où "la culture d'entreprise est fondée sur le progrès personnel et l'exemplarité, le risque est l'épuisement, assure Eric Albert, coach et fondateur de l'Institut français d'action sur le stress. Les patrons sont semblables à des champions en situation de compétition. Ils doivent se préserver comme tels." »