Souffrance au travail : de Mickey à la CGT…
La souffrance au travail se retrouve dans toutes les industrie et parfois dans des sociétés où on s’y attendrait le moins.
C’est ainsi que la souffrance au travail se retrouve à Disneyland Paris et à la CGT…
Commençons d’abord par le monde de Mickey.
Un article de Renée Reixludwig sur le site intelligence-rh.com explique que tout n’est pas si rose dans le « monde magique, sucré, rempli de gentils lutins colorés » : « depuis le début de l'année, plusieurs salariés de Disneyland Paris se sont suicidés et un salarié a fait également une tentative de suicide sur son lieu de travail. »
L’exemple le plus frappant :
« “Je ne veux pas retourner chez Mickey, je t'aime, pardon les enfants.” Ces mots, gravés sur le mur d'une des pièces de son domicile où il s'est donné la mort par pendaison, sont le message d'adieu laissé par Franck Claret, salarié d'Eurodisney à sa famille. Franck travaillait à Eurodisney depuis plus de dix ans et était chef de cuisine du restaurant California Grill, un des hôtels les plus huppés du complexe touristique.
« Selon plusieurs responsables syndicaux, il devait reprendre le travail le jour même de son suicide, après un arrêt maladie prolongé d’un congé. Agé de 37 ans, Franck était père de quatre enfants. Selon le syndicat FO, ce manager avait demandé sans succès, sa réaffectation à un autre établissement du groupe aux horaires moins contraignants, car “il ne pouvait plus concilier son rythme de travail avec sa vie de famille”. »
L’explication :
« Disneyland Paris qui ne fait pas exception est le pur produit d'un capitalisme “broyeur d'hommes” ».
« Le rapport 2008 du service santé d'Euro Disney pointait parmi les 14 500 « cast members » du parc la « multiplication des pathologies liées à l'usure et à l'hypersollicitation », ainsi que la progression, « en fréquence et en gravité », des accidents du travail (AT).
Et ça ne s’améliore pas :
« Depuis, c'est pire, malgré le renforcement des effectifs médicaux et paramédicaux. “En matière d'AT et de maladies professionnelles, la situation s'est nettement dégradée”, confie à L'Express le Dr Farshad Majidi, responsable du service médical. Le taux d'AT est désormais plus élevé à Euro Disney Paris que dans le bâtiment et les travaux publics, révèle le rapport 2009. “Ce niveau s'explique par la dangerosité de certains métiers, comme celui de cascadeur, et par le vieillissement de notre population, assure Bruno Fournet, directeur santé et sécurité à Euro Disney. Et nous déclarons tous les accidents, même bénins.” »
La réaction des responsable est partout la même, le déni :
« Sur le taux élevé d'accidents du travail à Disneyland, M. Archambault dit que la compagnie était au courant du problème et essaie d'améliorer son record mais la plupart des incidents ont été relativement “mineurs”.
« “Nous n'acceptons pas que ces événements tragiques (suicides) puissent être directement liés à Disneyland Paris”, a dit M. Archambault. “Mais nous reconnaissons que, avec la crise financière, nous sommes tous soumis à un stress accru.” »
Et derrière les sourires affichés lors de la parade, ce sont parfois des drames qui se cachent.
Les syndicats devraient défendre les salariés et il est vrai que chez Mickey, ils sont pratiquement inexistants :
« Selon Cyril Lazaro, militant syndicaliste chez Mickey, “un tel bilan marque l'inexistence des organisations syndicales, la non existence du dialogue social, l'incompétence du recrutement, la porte ouverte aux abus en tous genres de la part des ressources humaines et des petits chefs.” »
Mais encore faudrait-il que pour défendre correctement les salariés, les syndicats soient exemplaires… Ce qui n’est pas toujours le cas.
L’Expansion de mai 2010 fustige la “CGT capitaliste”… (pages 90-95)
« Facturer des honoraires pour assurer la défense de son client ? Un procédé normal de la part d’avocats ou de conseils. Moins de la part de cégétistes ! C’est pourtant ce qui se serait passé en 2007, à l’union locale de Castres, où des “camarades” auraient prélevé sans barguigner des pourcentages sur les indemnités que recevaient les plaignants. Voilà une pratique qui bafoue les valeurs de fraternité de la CGT. Elle en est même tellement éloignée qu’elle est… illégale ! »
Voilà pour ceux qui font appel à la CGT pour les défendre.
Mais la CGT a également des salariés au travers des divers Comités d’Entreprise qu’elle gère.
Et là, comme le dit l’Expansion : « le syndicat n’a rien à envier aux patrons voyous »…
Explications :
« Lorsqu’en 2001 Philippe Chabin, secrétaire d’un comité d’établissement (CE) de la SNCF, détecte une “anomalie” dans la répartition de la dotation que lui verse la SNCF, il n’imagine pas dans quel engrenage il met le doigt. “Tous les ans, 200 000 euros s’égaraient dans la nature. J’ai voulu alerter les instances fédérales de la CGT”, raconte ce cheminot, syndiqué depuis 1985. La CGT est en effet majoritaire dans la quasi-totalité des 26 comités d’établissement de la SNCF. Trop zélé, Philippe Chabin ? Sans doute. “En 2006, j’ai été écarté des listes électorales par la CGT. J’ai perdu mon poste de secrétaire du comité d’établissement. Dans la foulée, des salariés CGT du CE qui m’avaient soutenu ont eu des problèmes.” Telle Malika Duraud, assistante aux ressources humaines et cégétiste convaincue. A l’instar de la trentaine de salariés qui travaillent dans ce comité, elle n’a pas un statut de cheminot, mais un contrat de droit privé. Elle est donc vulnérable. “On a voulu supprimer mon poste, puis on m’a mise au placard, témoigne-t-elle. J’ai subi toutes sortes de brimades. Fin 2008, on m’a notamment demandé de travailler entre Noël et le jour de l’An, alors que les bureaux étaient fermés.” A qui se plaindre, quand l’employeur et le syndicat sont tous les deux cégétistes ? Seule solution : saisir les prud’hommes. Fin 2009, les sages rendent leur verdict : “Les instances dirigeantes se sont servies de leur autorité patronale pour la faire craquer, elles méritent le titre de patrons voyous”, écrivent-ils carrément, avant de condamner le comité d’établissement à lui verser 15 000 euros pour “harcèlement moral” – décision qui fait actuellement l’objet d’un appel.
« “Ce sont des pratiques que la CGT ne tolérerait pas si elles émanaient d’un dirigeant d’entreprise, s’emporte Philippe Chabin. Et encore, si elles ne concernaient que quelques individus, mais on trouve des cas similaires dans d’autres comités d’établissement, notamment à Lyon ou à Tours.”
« Aujourd’hui, Malika travaille toujours au CE. A mi-temps. “J’ai écrit à Bernard Thibault. Il ne m’a jamais répondu, raconte-t-elle. Pourtant, il doit savoir ce qui se passe, puisque sa femme travaille au comité central d’entreprise (CCE) de la SNCF.” Mais ce CCE, qui regroupe plus de 300 personnes, donne-t-il le mauvais exemple ? Une vingtaine de cadres et de salariés y auraient été licenciés ces dernières années. Fin 2009, sa direction a même été épinglée par les prud’hommes pour trois cas de harcèlement. Là encore, les décisions sont en appel. “Il y a eu discrimination à l’égard de ces anciennes cégétistes qui avaient créé un syndicat dissident”, explique leur avocat, Me Burget. La CGT condamnée pour non-respect des pratiques syndicales ? Un comble ! »
Mais ce n’est pas tout :
« A la Caisse centrale d’activités sociales, la structure (contrôlée par le CGT) qui gère les œuvres sociales d’EDF-GDF Suez, ce n’est pas mieux. “Climat délétère”, “relents de stalinisme mâtiné de management dur”, rapportent les témoins. Grève des salariés, mises au placard, licenciements brutaux, et même un suicide, fin 2009. »
La conclusion de l’article est cruelle, mais méritée :
« Pour une CGT qui fait de la souffrance au travail un cheval de bataille et qui, fin mars, s’est engagée aux côtés du Medef et des autres syndicats pour lutter contre la violence au travail, ces exemples font désordre. “Mieux prévenir le harcèlement, le réduire et, si possible, l’éliminer”, préconise l’accord. Il y a du boulot. Même à la CGT. »