Les résultats du G20…

Publié le par Bernard Sady

Comme je vous le disais la semaine dernière à la suite de Jean-Marc Vittori, le G20 ne ferait rien.

Et effectivement, il fut… vain selon le jeu de mot d’Attali.

 

Jacques Attali est certainement un de ceux qui a le mieux analysé ces résultats.

François Leclerc m’a déçu avec un article assez léger et survolant le compte-rendu de ce G20.

 

 

Venons-en à ce qu’a écrit Attali sur son blog.

 

Il avait commencé par prévenir que « Le G20 de Pittsburgh ressemblera à s’y méprendre à celui de Londres » dans un billet du 21 septembre intitulé « Le G vain ».

 

Il affirmait en continuant la comparaison entre les deux sommets : « A la veille de Pittsburgh, comme pour Londres, on dira que la situation s’améliore ».

Mais « Comme avant Londres, la situation est en réalité extrêmement  difficile . La production demeure très inférieure à ce qu’elle était avant la crise. Le chômage augmente et augmentera, en particulier en Allemagne, en France et en Italie, pays où, selon l’OCDE, le redressement de l’emploi sera «beaucoup plus long que celui de la production » et aboutira à « une crise sociale à part entière ». Les fonds propres des banques restent plus que jamais insuffisants. Les produits dérivés sont toujours là, sans aucun contrôle, constituant l’essentiel des activités rentables de bien des banques. La dette publique continue d’augmenter partout, à tel point qu’il est maintenant, et pour très longtemps, impossible aux Banques Centrales d’augmenter leurs taux d’intérêt, ce qui les prive du pouvoir de lutter contre l’inflation, si elle se déclenche un jour, comme c’est vraisemblable. »

 

Et il faudra détourner l’attention sur les vrais problèmes : « Comme à Londres, 27 chefs d’état (et non 20) […]débattront longuement d’un sujet présenté comme essentiel, qui fait aisément scandale et sur lequel ils peuvent faire croire qu’ils ont quelques moyens, mais qui n’a, en fait, qu’un rapport très lointain avec la récession : à Londres, ce fut les paradis fiscaux, facilement dénoncés ; à Pittsburgh, ce sera les bonus des traders, mis au pilori. Comme à Londres, on prendra quelques décisions bien visibles à leur propos. Et comme à Londres, ces mesures n’auront aucun impact sur la crise et seront contournées : les traders, comme les fraudeurs du fisc, débordent d’imagination... »

 

Il y aura cependant des décisions qui seront prises : « Comme à Londres, on prendra des décisions, qu’on n’appliquera pas, sur les fonds propres des banques et sur la régulation systémique. Et comme à Londres, on n'en prendra pas sur les menaces de demain : la fragilité des banques, le retour des activités spéculatives, l’absence de contrôle des acteurs financiers non bancaires, tels les fonds d’investissement et les compagnies d’assurance. »

 

Enfin la communication ne sera pas oubliée : « Comme à Londres, on prendra mille et une photos, on se congratulera, on se quittera. »

 

Mais les problèmes resteront : « Puis les dettes publiques continueront d’augmenter, les institutions financières seront de plus en plus instables, le chômage augmentera. Et un jour, sans doute, devant  un nouveau  désastre, il faudra agir. On se retournera alors vers les gouvernements : exsangues, ils ne répondront plus. Il n’y aura plus, alors, de G 20. »

 

 


Et le lendemain de ce G vain, il se contentait de constater que les résultats étaient conformes à ce qu’il avait prévu : « Oui, le G 20 fut vain »

 

Il constate tout d’abord que tous les gens sérieux arrivent tous à la même conclusion : « Malgré le matraquage médiatique, et mis à part les commentaires laudatifs de quelques hommes politiques, pas un spécialiste compétent ne peut prendre au sérieux ce qui s'est joué à Pittsburgh. »

 

« Certes, et très largement grâce à Nicolas Sarkozy, le G 20 a eu lieu, et c'est mieux que rien. Mais ce n'est pas nouveau : Depuis exactement 20 ans, avec le sommet de l'Arche, qui s’est tenu  le 14 juillet 1989, a Paris, des chefs d'état du sud participent au G7 devenu G8. Et les pays du Sud, à Pittsburgh n’ont fait que réaffirmer, comme depuis des années, la nécessité de renforcer la place de l’Inde et de la Chine, dans le FMI, au détriment de l’Europe, sans que les Etats-Unis y perdent leur droit de veto et sans que l’Afrique subsaharienne, absente du G20,  ne soit correctement représentée. »

 

« Certes, grâce aussi très largement au Président français et à Christine Lagarde, le diagnostic de la crise fut pour la première fois correctement posé : l'insuffisance des fonds propres et du contrôle des banques.  

 

« Mais, comme on pouvait le prévoir, rien de concret n'a été décidé pour pallier à ces causes. Et encore moins pour remédier a ses conséquences. Et bien moins encore pour éviter son retour. »  

 

Voyons le détail de ces non décisions : « D’abord, rien n’est prévu pour mettre en œuvre des déclarations d’intention promettant, pour palier aux causes de la crise, d’harmoniser les fonds propres des banques européennes et américaines des banques… en 2012 : Comme si , face à un incendie, on  assurait que tout est réglé parce que on promet que les pompiers passeront demain. « De plus, le G 20 souhaite que les fonds propres nécessaires pour couvrir les risques de la spéculation pour compte propre soient plus élevés. Mais, là encore, des mots : aucune décision ne précise   quelle instance   mettra cela en place.  Et même si cela était le cas, ce communiqué enterre définitivement la nécessaire séparation entre les métiers de banquier commercial et de banquier d’investissement, dont la confusion est pourtant à la racine de la crise.  Rien non plus sur la régulation des métiers financiers non bancaires. Aucun progrès, au total, vers la mise en place d’une Organisation Mondiale de Finance, qui seule pourrait transformer ces judicieuses promesses en réalité. » Je ne suis pas tout à fait d’accord avec ce dernier point qui ressemble à une fuite en avant : toujours plus de mondialisation pour régler les problèmes. Le contrôle est beaucoup plus efficace s’il est fait au niveau national. Vouloir refaire une nouvelle ONU ne règlera rien…

 

Attali continue sur les déficits publics et le retour de la crise, et là, il a parfaitement raison : « Ensuite, rien sur les conséquences de la crise : rien sur les déficits publics (8% au moins cette année en France, et plus de 13% aux Etats-Unis !) ni sur le chômage, ni sur l’équilibre des monnaies, ni sur l’aide aux pays d’Afrique subsaharienne.

« Enfin, rien pour éviter le retour de la crise, qui exigerait de pousser l’Occident à épargner d’avantage, à améliorer sa productivité, à former des talents, à remplacer des matières premières rares et polluantes par des progrès techniques.

 

Sa conclusion : « En fait, ce G20 fut une manifestation d’un monde qui évolue vers un dialogue entre la Chine et les Etats-Unis, vers un G2, qui reconnaît son impuissance à régler la crise, qui avoue que, faute de crédits des banques aux entreprises, la relance publique devrait continuer à faire vivre le monde à crédit, laissant aux contribuables de demain le soin payer les pertes des banquiers d’hier et les bonus des banquiers d’aujourd’hui. »

 


Si la récession est techniquement terminée dans la plupart des pays, la crise n’est pas terminée. Et même si une reprise vigoureuse arrivait en 2010 ou 2011, les problèmes n’étant pas réglés, une nouvelle crise ne manquerait pas de survenir et cette fois-ci, les états, asphyxiés par leurs dettes, ne pourraient que constater, impuissants, l’économie s’effondrer…

 


Un article de Pierre-Antoine Delhommais dans Le Monde du 26 septembre « Les G20 passent, l’horloge tourne » va dans le même sens et apporte des précisions complémentaires sur la dette des états. N’hésitez pas à le consulter.

 

Publié dans Economie

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